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Libération

Marseille sert la louche aux riches Moscovites

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publié le 6 avril 2004 à 0h07

Moscou, de notre correspondante.

Sitôt poussée la porte du restaurant Boulevard, c'est une vague qui monte aux narines. Les pots d'échappement de Moscou, le froid et les pauvres babouchkas qui mendient dans la rue sont déjà oubliés : une délicieuse odeur de poissons safranés remplit si bien le restaurant que l'on se croirait tout de suite à Marseille. C'est le dernier chic de la saison à Moscou : un restaurant huppé du centre-ville, Boulevard, a eu l'idée juteuse de proposer aux riches Moscovites la véritable bouillabaisse. Deux fois par semaine, rascasses, vives, rougets-grondins et crabes verts sont livrés tout exprès du marché de Rungis jusqu'à Moscou. Un chef de Marseille, Guillaume Sourrieu, cuisinier à l'Epuisette, est venu en février former le personnel et donner son cachet d'authenticité. Depuis, midi et soir, les «nouveaux Russes», enrichis ces dernières années et affamés de nouvelles sensations, viennent déguster la soupe traditionnelle des pêcheurs de Marseille.

Chasse à l'arête. Pour deux personnes, il en coûte 150 dollars, soit à peu près le salaire mensuel russe. Mais, dans la capitale russe, les millionnaires ne manquent pas, et l'exotisme n'a pas de prix. Mieux, la bonne vieille soupe marseillaise profite ici d'un problème de traduction : la rascasse, ingrédient essentiel de la bouillabaisse, s'appelle en russe «scorpion de mer», ce qui rend évidemment la promesse d'une «soupe au scorpion» particulièrement piquante, et peut justifier n'importe quel prix.

«A l'or