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«Une sole limande, une mouche qui pète...»

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Patrice Dard, écrivain, fils du père de San Antonio dont il a repris le flambeau, part en vacances aux Seychelles.
publié le 3 août 2005 à 3h11

«C'est une grande angoisse à l'avance : j'assemble toutes mes affaires en pointant une liste, mais c'est ma femme qui range dans la valise, moi ça finit pêle-mêle : j'allie admirablement maniaquerie obsessionnelle et foutoir absolu. Evidemment, j'ai une trousse à pharmacie qui soigne tout, angoisse, fatigue, douleur, coupures, choc allergique grave. Par chance, les boîtes se périment sans avoir été ouvertes, alors je les renouvelle au cas où... Le plus important pour moi ce sont mes gris-gris, en général de minuscules objets hétéroclites et secrets ayant appartenu à des proches : à mon père bien sûr, mais aussi aux vivants, ma femme, mes enfants, mes petits-enfants. Le tout, à peu près deux kilos, est emballé dans une enveloppe matelassée que je n'ouvre jamais, sauf pour la remplacer quand elle se désagrège. Elle ne me quitte jamais en voyage, ni dans les événements quotidiens : un rendez-vous à Paris, hop, je prends mon enveloppe. J'emporte aussi mes deux téléphones portables, ma clé USB, mes lunettes de rechange, de soleil, de près, de loin, que je ne porte jamais, ma vue s'étant équilibrée avec l'âge. Une bien belle organisation, tout ça, qui ne m'empêche pas de prendre des risques en mer alors que la pharmacie est hors de portée... Je suis un voyageur contradictoire et tout le monde s'en fout. San Antonio, lui, voyage plus marrant : l'acte de décès de Maurice Papon, une sole limande, le crâne de Victor Hugo enfant, le trou de la Sécu, le gouffre de Padirac, la valve du b