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Libération

Des tons qui virent avec le temps

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De l'eau de rose au Minitel, de la robe rouge au communisme, décryptage de codes.
publié le 15 novembre 2005 à 4h34

Le noir n'est pas la seule couleur à changer de code. Comme l'explique Annie Mollard-Desfour (1), il en va ainsi du rouge, teinte de référence dans toutes les civilisations : rouge feu, sang, vie, mais aussi mort, colère, violence, péché, rouge sulfureux ­ comme le noir. C'est aussi la couleur de la prostitution (robe rouge, lampe rouge des maisons closes), de la séduction et de la tentation, comme celle des fruits (la pomme de Blanche-Neige et celle d'Adam ?). On la retrouve encore illustrant prestige et mérite : pourpre du manteau royal jusqu'à la fin du XIIe siècle, couleur des vêtements des chefs des armées et de l'Eglise, rouge du ruban de la Légion d'honneur, du tapis, du label. Mais aussi rouge du peuple, du communisme, des luttes armées. Rouge toujours lié de nos jours au dynamisme, à la vitalité, à la vitesse (rouge Ferrari), et, comme le noir, moins sulfureux. «Parce qu'on ne croit plus guère au diable ?» s'interroge la linguiste.

Le rose, c'est l'enfance, le romantisme, d'abord ingénu comme celui des romans à l'eau de rose ou du vichy des blouses des écolières ­ qui deviendra celui moins naïf de Brigitte Bardot. Il incarne, à partir du scandale des «ballets roses» (affaire de moeurs dans les années 50), le rose d'une sexualité hard ou perverse. Et le téléphone rose, Minitel rose, les films roses qui ont pris le relais du rouge porno. En glissant dans l'homosexualité et les «triangles roses» imposés aux détenus homosexuels dans les camps de concentration, il est un