C'est un phénomène auquel Gilles Dupin de Lacoste, directeur commercial, s'est tant bien que mal accoutumé. De temps en temps, en proie à une «crise», il s'allonge sous son bureau, persuadé qu'il est en train de vivre ses dernières heures, terrassé par un infarctus. D'autres fois, c'est à la maison, devant sa glace, qu'un grain de beauté se transforme soudain en dangereux mélanome. A 52 ans, après trois décennies d'hypocondrie, il vient de publier un livre (1) où il décrit sa relation tragi-comique avec l'angoisse de la maladie. D'après lui, les hypocondriaques seraient de plus en plus nombreux, archétypes de notre société contemporaine qui «génère inquiétude et incertitude». Peur de la mort, besoin de conjurer le sort, angoisse héréditaire... Personne ne peut fournir une explication univoque de l'hypocondrie. Profils et manifestations sont divers. Huit de ces «malades imaginaires» nous ont confié leurs misères.
Le traumatisme de la tumeur
Cancer, grosseur, leucémie... Il est des mots qu'il ne faut pas prononcer devant un hypocondriaque, prévient Gilles Dupin de Lacoste. Christophe, 25 ans, confirme. Teint frais et sourire épanoui, ce jeune réalisateur est un parangon de vitalité. Plusieurs fois par an, pourtant, il se rue chez son médecin pour arracher une ordonnance d'analyses, fonce au labo, puis s'enferme chez lui et «attend la mort», convaincu que les résultats lui annonceront la pire des nouvelles. «La dernière fois que ça m'a pris, j'étais à côté d'un h