«T'es pas seul dans ce cas. Des chimios, plein de gens en ont maintenant !» «Un peu de courage. Arrête de ressasser.» «Encore fatigué ? Mais t'es pas guéri ?» Remarques maladroites, silences gênés et regards en biais pèsent peu face au choc d'un diagnostic de cancer, à son traitement, son lot d'effets secondaires ou à la crainte d'une rechute. Mais c'est une gifle qui rappelle aux malades ou à ceux qui ont guéri combien il faut batailler pour retrouver la «vie d'avant».
Ils sont de plus en plus nombreux à être atteints, de mieux en mieux soignés, mais le tabou persiste. «Aujourd'hui on peut guérir du cancer mais on en meurt socialement, déplore Fabienne Jégu, de la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), qui pointe surtout le problème du maintien dans l'emploi. Le patron qui craint des absences répétées va trouver un motif de licenciement ou pousser le malade à la démission.» Selon une enquête de la Drees (1) publiée fin mars, près d'un malade sur dix dit avoir été victime d'une attitude de stigmatisation de sa famille (3 %), de proches (5 %), du milieu professionnel (3 %) ou d'autres personnes (4 %). Parmi les plus exposés, les jeunes, les malades aux revenus modestes ou ceux portant des séquelles. Témoignages.
Eulalie ou le vertige du retour au travail. Arrêtée neuf mois pour un cancer des ovaires, Eulalie (2), 31 ans, s'attendait à une reprise en douceur dans l'entreprise où elle travaillait comme chargée de