Menu
Libération
Série

Sable émouvant

Article réservé aux abonnés
LES MUSTS ESTIVAUX (Fin) Aujourd'hui, ces petits grains sans lesquels la plage n'est pas tout à fait la plage.
publié le 12 juillet 2008 à 4h17

Probablement parce que le sable évoque le flux du temps, cette fuite ouverte par où chaque seconde de nos vies s'écoule en hémorragie, le sable c'est aussi l'amour dans ce qu'il a de plus éperdu. Les premiers mots d'amour sont écrits dans le sable, du bout d'un doigt qui s'amuse ensuite à caresser la colonne vertébrale d'un dos nu. Sensation fugitive et douce. Du grain de sable au grain de peau, il s'établit comme une continuité du désir et c'est peut-être pourquoi, dans Hiroshima mon amour, les premières images du film d'Alain Resnais montrent un dos d'homme en gros plan, qu'une main de femme caresse, et auquel se superposent des images d'érosion. La peau passe à travers une sorte de filtre nucléaire qui la brûle, la désagrège, la pulvérise, la ronge et lui fait prendre l'aspect d'une photo ancienne. Cet amour-là est déjà mort, au moment même où l'homme et la femme jouissent. Avec la même frénétique conscience de leur fragilité, les héros de la Femme des sables s'étreignent. Dans ce film de Teshigahara, ils s'affrontent en silence dans un trou profond au milieu des dunes. Des grains de sable collés aux paupières, aux ongles, ils s'embrassent passionnément alors que la fosse menace de se refermer sur leurs corps. Le mot sable évoque aussi immédiatement la scène de l'étreinte sur la plage dans Tant qu'il y aura des hommes.

Légionnaire. Le sable réveille toutes ces images stéréotypées de couples qui s'enlacent à la limite des flots, posant leur emprei