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Libération
Interview

«J'étais submergée par la beauté du site»

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publié le 25 août 2008 à 4h43

Il y a quinze ans, à l'occasion d'un voyage en Syrie, Françoise Cloarec (1), psychanalyste et peintre, a vécu un syndrome de Stendhal. Elle revient aujourd'hui sur cet étrange périple intérieur.

«Je suis partie en 1993 en Syrie, pour faire une conférence et exposer mes peintures. Quitter son pays pour se retrouver dans un endroit où les repères habituels n'existent pas est toujours impressionnant. A Alep, j'ai été véritablement submergée.

Ici, à Paris, on vit chichement avec nos sens. Quand on voyage, la lumière est différente ; les sons, les odeurs nous interpellent différemment, avec une force que l'on avait oubliée.

A l'époque, je ne lisais pas l'arabe et je n'arrivais pas à lire les panneaux dans les rues et les souks. Je me repérais donc aux odeurs : les épices, le cuir, la laine, l'encens. C'est par elles que je retrouvais mon chemin.

Surprise. Sur le syndrome lui-même, j'ai un souvenir extrêmement précis. C'était à Ebla, un site historique à 60 kilomètres au sud d'Alep, datant du troisième millénaire avant Jésus-Christ. C'est là que l'on a retrouvé 17 000 tablettes d'argile, gravées dans un dialecte sumérien. Parmi ces ruines, dans ces lieux où sont passés Alexandre, les Romains, les Ottomans, les Croisés, on est tout d'un coup dans les pas de gens qui ont vécu et sont morts plusieurs milliers d'années auparavant.

Cela renvoie à des questions fondamentales, à l'éternité, à sa place d'individu dans cette immense chaîne de l'humanité. Tout cela ne peut que faire vaciller : c