Mais non, on ne va pas tous finir chômeurs. On sera juste en recherche d’emploi. Nuance. D’ailleurs, on n’ira même pas pointer à l’ANPE, vu que maintenant (et depuis sa fusion avec l’Unédic) c’est au Pôle emploi qu’il faut toquer. Nettement plus chic. Là, ce n’est pas un boulot de croque-mort qu’on nous proposera. On dit désormais conseiller funéraire, ce qui est quand même moins rude. Elle est pas belle la vie en temps de crise ? De plus en plus. A en croire la palanquée de mots «cache-misère» dont on nous rebat les tympans.
«Ecrans de fumée». Grand collectionneur de termes «politiquement corrects» dont il a déjà fait un livre (1), le philologue Georges Lebouc avoue s'en mettre plein les poches ces temps-ci : «Magnifique, cette façon de tout positiver !, ironise-t-il. Manier l'euphémisme, c'est une tendance générale. Mais l'économie est vraiment un terrible domaine où tous les substituts aux vilains mots sont bons.» Le comble ? «Entendre parler en ce moment de potentiel de croissance là où il y a retard économique.» D'ailleurs, c'est décidé, son prochain bouquin sera consacré à la langue de bois.
Dans la même veine, Philippe Renève, économiste de formation, est chaud bouillant contre tous ces «écrans de fumée pour faire passer la pilule». Et d'épingler cette façon d'appeler les clodos des SDF (ben oui, ça sent meilleur), le code du travail un «frein à l'embauche» ou les allégements d'impôts pour les plus aisés «paquet fiscal» ou «bouclier fiscal