C’est une petite pomme de terre à la pelure fine et délicate comme du papier de soie, au nom plaisant et joliment désuet que l’on dirait tout droit sorti du catalogue du Jardin du cheminot ou d’une nouvelle de Maupassant. La bonnotte de Noirmoutier n’est pas une patate à soldat, une Marie-couche-toi-là du tubercule. C’est l’enluminure de la pomme de terre, une strophe d’ultragourmandise dans le règne parmentier.
Avant de la manger, on se la raconte comme une belle histoire qui vous réconcilie avec le genre humain quand il ne s'évertue pas à dézinguer le règne végétal à coups de semences et d'hybrides standardisés. Car la bonnotte revient de loin. Elle a débarqué sur l'île de Noirmoutier dans les années 20. A l'époque, on l'appelait «bounotte», «bonnette» ou «bonnet». On l'aimait bien dans l'assiette de l'entre-deux-guerres : en 1938, un classement effectué selon les goûts des consommateurs à Paris et en province plaçait la bonnotte en tête des variétés de pommes de terre préférées. Mais la mécanisation de l'agriculture dans les années 60 a raison de la bonnotte : elle est petite, fragile, il faut la ramasser à la main. Pas assez rentable donc. Un petit bout de patrimoine s'éteint. Jusqu'au début des années 90 où la coopérative agricole de Noirmoutier décide de ressusciter la bonnotte avec le concours de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra). La bonnotte revient sur le marché (Libération du 16 mai 1998). Chère, certes (4 euros le kilo) mais la brièvet