A la question «avez-vous le sentiment d'appartenir à une classe sociale ?», près de la moitié des Français ont répondu oui. Un tel score a surpris les chercheurs réunis par l'Institut national des études démographiques (Ined) qui souhaitaient avant tout savoir où les enquêtés se situaient d'eux-mêmes sur l'échelle sociale. Quelques mois avant cette enquête, Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, avait évoqué la «France d'en bas». L'expression semble avoir marqué les esprits puisque de nombreux enquêtés l'ont reprise à leur compte, souvent avec ironie. Agnès Pélage et Tristan Poullaouec en ont d'ailleurs tiré le titre de leur chapitre : «La France d'en bas qu'on regarde d'en haut».
Entretien avec Tristan Poullaouec, sociologue au Centre nantais de sociologie.
«Français moyens», «prolétaires», «France d’en haut», existe-t-il une conscience de classe dans la France d’aujourd’hui ?
Le sentiment d'appartenir à une classe sociale a encore du sens pour la moitié des enquêtés. Mais il ne s'agit pas, ou très peu, d'une conscience de classe au sens de la vulgate marxiste qui est absente des réponses. Il s'agit plutôt d'une impression, celle d'appartenir à un même milieu social. Cela dit, la moitié des enquêtés ont répondu négativement et cela vaudrait une autre étude. Pour le moment, nous ne pouvons qu'émettre des hypothèses : est-ce le refus d'une vision classiste de la société manifesté essentiellement par les artisans, les commerçants, les chefs d'entreprises et les agriculteurs ? De l'indifférence ? Ou une impossibilité à nommer son appartenance ? Ces pistes seraient à