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Libération

Le cas coriace de l’araucaria

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publié le 22 janvier 2010 à 0h00

Apparaître il y a plus de 100 millions d'années, résister à la prédation des dinosaures, survivre à l'extinction du crétacé qui a balayé la moitié des espèces. Puis couler des jours tranquilles dans les jardins, par exemple celui du Museum national d'histoire naturelle où il fait l'admiration des joggeurs : voilà ce qu'on appelle un destin. C'est celui d'Araucaria araucana, l'arbre aux feuilles en écailles acérées, communément qualifié de «désespoir des singes» et de «fossile vivant», deux dénominations mensongères.

Certes, on a découvert des végétaux fossilisés ressemblant comme des clones aux araucarias actuels. Mais on sait pour sûr qu'aucune espèce ne traverse, le génome figé, les millénaires, les changements climatiques et la lutte contre les ennemis. Araucaria araucana est donc une plante moderne, fruit de l'évolution d'un lointain parent qui a vu jogger les géants du jurassique. Quant à son rôle dans une déprime des singes, elle n'a jamais existé que dans l'imagination d'un Anglais, comme le rappelle le dendrologue britannique Allan Mitchell.

En 1782, le frère jésuite Juan Ignacio Molina en virée dans les Andes chiliennes reconnait en cet arbre à l'architecture symétrique le représentant d'un genre végétal jusqu'alors inconnu. Il le baptise Araucaria araucana d'après les Indiens Araucanos qui en consomment sa graine. En 1795, l'espèce est mise en culture en Angleterre grâce au botaniste écossais Archibald Menzies qui aurait rapporté quelques