Amidi, vous allez vous attabler avec vos compères habituels de déjeuner à la brasserie qui fait l’angle avec le boulevard. On choisira le petit menu du jour avant de causer taule et turbin, mouflets et tribu. Ce n’est pas qu’on s’ennuie avant les hors-d’œuvre mais on ira tous se ravitailler dans le moutardier histoire de s’en tartiner une lichette avant d’attaquer l’œuf mayo ou les carottes râpées. La moutarde que l’on étale négligemment sur un quignon de pain fait partie de ces petits riens qui vous ragaillardissent au mitan de la journée. C’est un rite d’avant-becquetance qui vous fait monter l’eau à la bouche. On l’aime bien notre petit moutardier esseulé posé sur la nappe en papier. Avec une mention spéciale pour les pots joufflus avec couvercle en plastique orange. On pardonnerait même son contenu parfois fatigué plutôt que de se résigner à cette moutarde façon sachet de préservatifs que nous imposent les fast-foods et les bistrotiers radins.
Parce que la moutarde, ça se pioche, ça s’étale, ça se tartine. Même quand elle ne s’impose pas - gustativement s’entend - avec le plat du jour, on l’invite dans l’assiette. Comme une touche de complicité, un trait chaleureux dans un repas qui ne l’est pas forcément. Alors l’autre jour, pour rendre hommage à cette moutarde qui nous piquait déjà le nez à peine sevré avec les chipolatas au barbecue de l’oncle Bob, on prend le train pour Beaune et la maison Fallot qui est la dernière moutarderie familiale et indépendante de Bourgogne f