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Le gaspacho must go on

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Les Foodingues. Chaque jeudi, passage en cuisine et réveil des papilles. Aujourd’hui, une recette inspirée par le spectacle de deux filles de restaurateurs.
(Stu_Spivack / flickr)
publié le 1er juillet 2010 à 0h00

On était allé voir un pâtissier dans son laboratoire. Il était en train de confectionner des fraisiers. Les meilleurs de la ville. C’était un petit homme râblé, sombre de peau, qui fumait beaucoup. Des Gitanes sans filtre qu’il écrasait dans une boîte en fer-blanc qui avait dû contenir des gâteaux secs. On le regardait travailler sur son marbre de pâtissier. Taiseux, appliqué, minutieux.

On finit par lui demander comment il était entré dans le métier. Après un long silence, il se détourna de son ouvrage pour mimer le geste d'un marteau plantant un clou. «C'était un dimanche, dit-il. Mon père m'avait tiré du lit en me disant "on va te fabriquer un escabeau", parce que j'étais trop petit pour atteindre les machines de l'usine où il voulait m'envoyer le lundi comme arpette. Je suis allé pleurer au fond du jardin en m'imaginant avec des rondelles de pommes de terre sur les yeux comme mon père se les appliquait le soir quand il avait trop soudé. Ma mère a fini par le convaincre que je serais mieux en apprentissage dans la boulangerie-pâtisserie où elle faisait le ménage. Le lundi, je traînais les fagots de bois pour chauffer le four à pain.» Nouveau silence et notre pâtissier esquissa un petit sourire : «Au fond, ce n'est pas moi qui ai choisi le métier. C'est le métier qui m'a choisi.»

On avait ses mots en tête l'autre jour dans les murs du centre culturel de Mains d'œuvres (1) en assistant à Qu'est-ce qu'on va faire de toi ? (2), une épopée dîn