Poétiques et vénéneuses : deux adjectifs qui résument assez bien l'aura des maisons de tolérance qui firent les délices des viveurs de la fin du Second Empire à la fin de la IIIe République (et de la France pétainiste, il faut bien le dire). Nicole Canet, ancienne danseuse et galeriste, collectionne les photos anciennes qu'elle utilise dans la préface de ce magnifique ouvrage, Maisons closes, 1860-1946 (1). L'occasion non pas de relancer la brûlante polémique sur la réouverture des bordels en France, évoquée en mars par la députée UMP Chantal Brunel (2), mais de revoir ces clichés troublants du tournant du siècle.
Pas question ici, non plus, de prôner l’apologie des maisons de tolérance, alors que les débats reprendront en septembre. Juste l’occasion de contempler cet univers de luxe des lupanars chics d’antan, où tout le monde littéraire, politique, financier de cette fin du XIXe siècle se vautra avec gaillardise.
«Bitte». Entre autres, Maupassant, les frères Goncourt qui dépeignent dans leur journal fameux certaines muses de bordels «affalées sur le divan avec des coquetteries de vache», Huysmans écrivant assez crûment qu'il se fait «travailler par les aimables et bonnes gouines des bons lupanars. Pompe et bitte [l'orthographe de l'époque, ndlr]», Flaubert qui voit la prostitution comme un «révélateur de l'existence» (3), et tous ces écrivains, fascinés par les putes, qui employèrent la troisième personne pour p