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Libération

L’art d’accommoder la désuétude

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publié le 19 février 2011 à 0h00

Même dans les gares, les horloges ne donnent plus l’heure exacte. Sans doute parce que le plus grand nombre des passagers est muni de téléphone portable, qui sert de montre, de calculette, de télévision, de passe-temps, de doudou, de sèche-cheveux, de mixeur, de radio, de journaux, d’agenda, de cinéma, d’occupe-mains, et la liste n’est pas close.

Donner l’heure sans qu’on la demande est un service public qu’on ne remarque pas tant qu’il fonctionne, mais il suffit qu’il soit détraqué, pour qu’il attire l’œil. Rien n’est plus visible qu’une horloge aux aiguilles vacillantes, comme on en croise de plus en plus souvent dans les pays développés. Est-ce qu’on achète moins d’objets depuis qu’on dispose d’un appareil à tout faire, susceptible de les remplacer intégralement ? Il semblerait que non, puisque le téléphone fait pousser toute une arborescence de nécessités obscures et d’applications diverses.

Il n’empêche, les cadrans paresseux donnent le la. Certaines montres à la pointe du snobisme dissimulent comme un secret une heure qui est la même pour tout le monde, en supprimant les écrans. Et aujourd’hui, les jeunes gens les plus branchés revendiquent une désynchronie avec leur temps, choisissent de jeter leur mobile, au grand dam de leur employeur, s’ils en ont un.

Avec cette attitude, apparaissent de nouveaux usages, qu'on croyait révolus. Des cliniques du vêtement, où l'on apporte son pull démaillé, renaissent, et les couturières de quartier reprennent du service. Et avec elles,