Armelle Andro est démographe, elle enseigne à Paris-I. Elle est l’un des chercheurs qui ont signé une lettre ouverte à Luc Chatel : «Pourquoi cacher le genre, monsieur le ministre ?» (1).
Que pensez-vous de la révolte des députés de droite contre la présence de la théorie du genre dans les manuels scolaires de biologie ?
Il est atterrant de voir avec quel manque de lucidité ils se sont engouffrés dans une brèche ouverte par Christine Boutin. Les rapports de genre sont des faits qu’on ne peut balayer d’un revers de la main. Il ne s’agit pas d’une théorie exotique venue des Etats-Unis. On sait depuis longtemps qu’il est illusoire de vouloir séparer les dimensions physiologiques de celles qui relèvent du social quand on parle du masculin et du féminin. Il n’y a pas de frontière stricte entre ce qui relève du biologique et le reste. Nous avons un corps, mais tous ses mécanismes physiologiques sont en partie déterminés par des relations sociales. On peut le retourner dans tous les sens, la vie humaine ne sera jamais seulement de la biologie. Et c’est bien des manuels de sciences de la vie dont on parle.
Qu’est-ce qui gêne ces députés ?
Ils redoutent une remise en cause de la «naturalité» de l’orientation sexuelle strictement hétérosexuelle. Voir une photo de la marche des fiertés dans un manuel scolaire, c’est pour eux inacceptable, voire impensable.
Qu’est-ce que la théorie du genre ?
Cela n’existe pas ! Il y a par contre des chercheurs qui ont démontré que les identités masculine et féminine sont socialement construites. En France comme ailleurs, cela fait plus de cinquante ans que l’on travaille là-dessus, en étudiant des domaines allant de la place des femmes sur le marché du tr