Maud et Clara remontent les Champs-Elysées, un sac siglé Abercrombie and Fitch dans une main, un téléphone portable dans l'autre : «On BBM à tous les gens qu'on connaît !» En clair, les deux collégiennes diffusent par tchat via leur Blackberry cet événement majeur : Maud vient d'acheter un pantalon de survêtement (72 euros) couleur brique et brodé «A&F» sur la cuisse gauche. Clara, qui n'a rien acheté, prend l'air blasé : «Ça pue à l'intérieur de la boutique tellement ils parfument à fond. Et puis, ils balaient tout le temps, alors qu'il n'y a rien à ramasser : c'est super propre.» N'empêche, elles brandissent fièrement leur trophée, une photo souvenir offerte par la marque. On y voit Maud et Clara, un peu figées, qui entourent un vendeur torse nu et très souriant, tel un chippendale dévoué. Alors, heureuses ? «Oui mais la mode, c'est cher.»
Elles égrènent les marques hors de prix qui les font rêver. La liste est longue. Leurs parents sont-ils millionnaires ? Non, mais Maud et Clara sont scolarisées dans le XVIe arrondissement où, visiblement, le budget habillement est sans limite. Leur collège semble peuplé de «fraîcheurs», c'est-à-dire de filles dans le vent, de la racine des cheveux à la plante des pieds. Les collégiennes lissent mécaniquement leur longue mèche de cheveux : «Ce n'est pas qu'un truc de filles : il y a aussi beaucoup de garçons fraîcheurs.» A quoi reconnaît-on un plouc ? «Il porte un jean s