Marie Pezé, docteur en psychologie, psychanalyste, et expert près la cour d’appel de Versailles, a créé la première consultation Souffrance et travail en 1997 à Nanterre. Il existe désormais 35 centres de ce type en France (1).
A quoi est due cette inflation éditoriale sur le travail ?
Il y a toujours eu beaucoup d'ouvrages sur la question, des experts qui travaillent sur le sujet. On dispose en France d'une école d'ergonomie, de psychologie du travail, de psychodynamique. Ces livres franchissaient rarement le cercle des spécialistes. Le tournant, c'est l'ouvrage de Marie-France Hirigoyen, le Harcèlement moral : la violence perverse au quotidien (1998). Et aussi, la même année, le livre de Christophe Dejours, Souffrance en France. C'est l'époque où nous ouvrons nos consultations. Un mouvement plus idéologique se profile, le travail y est décrit comme un calvaire, on cherche de quelle manière on pourrait s'en débarrasser. En parallèle, on assiste à l'émergence de livres sur le management. Comment être un «bon manager», construire une équipe. Des publications extrêmement simplificatrices éclosent. La notion du manager à l'anglo-saxonne devient prépondérante autour de l'idée que ce qui se perd, c'est la connaissance des métiers. On n'a plus besoin de les connaître pour être un manager. Cela touche toutes les entreprises.
Observez-vous une montée des pathologies liées au travail ?
La loi de modernisation sociale de 2002 crée un nouveau délit, le harcèlement moral est inscrit dans le code pénal. On donne ce nom-là à la maltraitance managériale. Bien entendu, un marché juteux, «le