L’autre jour, l’une de mes filles a eu 17 ans, ça fait drôle ! Une bouteille de son année de naissance a aidé à supporter le choc. Un château Talbot, appellation saint-julien, dans le Médoc. Le domaine, qui remonte à un général anglais battu à la guerre de cent ans, ne figure pas parmi les plus grands du Bordelais. Mais j’entretiens avec lui un rapport particulier, nourri de trois souvenirs. Au premier, je ne buvais encore pas trop de vin mais j’en avais récupéré, je ne sais comment, une bouteille. Quel millésime ? Cela ne me préoccupait pas. En revanche, pour la première fois, je me suis penché sérieusement sur une bouteille, et je suis tombé dedans. Une belle émotion. On l’avait ouverte un soir sans en boire beaucoup et les jours qui ont suivi, je me suis resservi, un verre chaque fois, dans la cuisine. Et chaque soir, le vin avait changé par rapport à la veille. C’est donc qu’il était vivant. Par ailleurs, j’imaginais jusque-là le goût du vin de façon assez monolithique. Et là, je réalisais soudain qu’il était constitué de multiples grains, de nuances. Je me souviens du cacao, du cuir. Des arômes venus sans doute de la torréfaction du fût, mais qu’importe. Il faut entrer dans cette histoire de vin par un bout, puis avancer au plaisir, sans se laisser inhiber, sans perdre l’émotion.
Quelques années plus tard, une copine bordelaise m’a invité à la fête de la fleur. Au château Cantenac-Brown, dans le Médoc, des centaines de grands acheteurs et de passionnés. Un dîner délicieu