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Tu mitonnes

Sardines, l’écaille des jours

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Le vendredi, c’est réveil des papilles et passage en cuisine. Aujourd’hui, rencontre avec un petit poisson.
publié le 28 juin 2012 à 19h06

On est lundi matin. Au bistrot. On va boire un seau de café pour se déboucher la tronche qu’on a grave ensommeillée. Comme tous les lendemains de dimanche, hein. En fait, c’est un rituel avec les aminches. Tous les débuts de semaine, on se rassemble comme un troupeau de Charolais qui va à l’abreuvoir ou plutôt à l’abattoir. Faut voir les mines. C’est pas des portes de grange, c’est des grilles de cimetière. Tellement contents de retourner au turbin qu’on a enterré nos sourires dans le carré des sinistres.

Alors pour se mettre en jambes, nos zigues ont l’instinct grégaire et se rassemblent chez Idir, le temps de deux ou trois tournées de jus de caserne. Bon Dieu, Idir, quand est-ce que t’apprendras à faire le café ? Faut voir nos mines quand on avale sa lavasse. Et que ça grimace, que ça grince du gosier à la face du monde en plein air. Parce qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige, on s’esbaudit en terrasse histoire que les accros de la cigarette à cow-boys s’en grillent une. Et puis on cause. Comme des concierges qui cancanent sur tout et sur rien. Surtout sur rien.

D'abord, il y a «Bouboule», surnommé ainsi quand il finissait le hachis parmentier en bout de table à la cantine du lycée. Lui, c'est pas compliqué, il n'y a que le foot qui le fait bavasser. Quand il monte le son sur le championnat, nous, on se met en mode automatique pour faire semblant de l'écouter en hochant la tête comme le chien sur la banquette arrière. «Tu m'écoutes ?» qu'il dit en nous bourrant