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portrait

Paris. Le banc de la place de Séoul

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Un autre regard. Depuis quatre ans, Libération et l’Association pour l’aide aux jeunes auteurs (Apaj) organisent un concours de reportages sur le thème du voyage réservé aux moins de 30 ans, parrainé par Erik Orsenna. Le thème de l’année était «Portraits de villes», une approche personnelle et originale d’une cité, d’un quartier ou de ses habitants… (8/12)
par Alice Rosenthal
publié le 13 août 2012 à 19h07

J’aime dessiner sur les bancs de la ville même quand je n’ai plus le temps. Au moins, je peux saisir un détail ahurissant. L’instant d’un croquis. J’aime croquer Paris.

Mon banc préféré se trouve sur la place de Séoul dans le XIVe arrondissement à côté d'une fontaine Wallace, tout aussi verte que lui. Il y a trois bancs en fait, mais je préfère celui de gauche parce que, lorsque je m'y assois, je peux apercevoir la place Brancusi. C'est là qu'on se précipitait en courant à la sortie de l'école maternelle pour acheter un pain au lait. Tous. Enfin, je crois. Il y avait beaucoup de monde en tout cas et comme chaque jour, je faisais un détour en passant devant mon banc de la place de Séoul.

Là, je m’y suis assise pour prendre le temps de regarder mes anciens croquis. Il y a des enfants qui passent en criant avec leur pain au lait, c’est la nouvelle génération. Qu’est-ce qu’ils sont marrants avec leur visage tout rond. Pourtant ces figures, ces expressions me sont souvent étrangères. Et ça me plaît. Evidemment, j’aime avoir mes repères, mes souvenirs, mon banc… Mais je ne peux pas m’en contenter. Parce que c’est ça aussi que j’aime dans la ville : il y a cette sensation d’infini, de secret aussi. Je suis délicieusement troublée par l’impression que je ne la maîtriserai jamais totalement, que je pourrai toujours me perdre dans cette satanée ville. Je veux pouvoir y vivre et m’étonner encore au bout de toutes ces années. Oui, c’est ça, je veux pouvoir m’étonner de cette im