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portrait

Istanbul. La fille de joie

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Un autre regard. Depuis quatre ans, Libération et l’Association pour l’aide aux jeunes auteurs (Apaj) organisent un concours de reportages sur le thème du voyage réservé aux moins de 30 ans, parrainé par Erik Orsenna. Le thème de l’année était «Portraits de villes», une approche personnelle et originale d’une cité, d’un quartier ou de ses habitants… (9/12)
par Lorène Barillot
publié le 15 août 2012 à 20h06

Chacun trouve ce qu'il est venu chercher à Istanbul. Les banquiers en week-end d'affaires y voient une ville moderne, des gratte-ciel et des McDonald's, il y en a partout. Le capitalisme transpire dans cette mégalopole de près de 15 millions d'habitants qui grouillent entre deux taxis. Ceux qui ont été bercés par les Mille et Une Nuits s'extasient en pénétrant dans la mosquée Bleue ou devant le regard ravageur d'une femme voilée au détour d'une ruelle du marché aux épices. Ils retrouvent, comme ils l'espéraient secrètement, tous les clichés de l'orientalisme amenés par wagons entiers de l'Orient-Express depuis plus de cent ans. Les baroudeurs qui viennent sans a priori sont conquis par la ville, la bienveillance, l'hospitalité et la gentillesse des habitants, ses mélanges tous azimuts, ses avocats en costard cravate qui achètent du haut de leur 4 x 4 un bouquet de marguerites à des gitanes en guenilles, ses cargos chargés de pétrole qui manquent de faire chavirer les petits pêcheurs, ses vendeurs d'amandes bousculés par des jeunes filles en talons aiguilles qui se faufilent entre le kitsch de décorations de Noël en plastique et des portraits des morts pour la liberté.

Le Grand Bazar n’est plus seulement un quartier. C’est la ville elle-même qui s’offre ainsi, carrefour millénaire où s’entrechoquent cultures, langues et couleurs du monde.

Mais bien vite tout se dissout tel le raki dans l’eau. L’étranger vacille, comme pris aux tripes par cet alcool entêtant.

Ce sont les