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Libération

Mon premier est un ruban rouge, mon second de la cire au bouchon

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publié le 21 mars 2013 à 21h06

On quittait la vallée du Rhône à Pont-Saint-Esprit, pour s’enfoncer vers l’Ardèche et sa garrigue, ses arbres entremêlés, ses chênes-lièges aux troncs lisses à force de servir de grattoir aux sangliers. On avait hâte d’arriver, mais on s’arrêtait en route, à Saint-Julien-de-Peyrolas, dans le Gard, acheter du vin au domaine de la Charade, chez Jullien. On faisait gaffe au chien qui tournait au bout de sa chaîne. On passait un portail en fer, puis sous les branches d’un vieux mûrier, au tronc très large et court, pour atteindre le caveau au fond d’une petite cour. On achetait ce bon vin rouge dans des bouteilles portant un ruban rouge au col et de la cire sur le bouchon.

L’étape signifiait le début des vacances. Nous rentrions au pays. Labastide-de-Virac, vingt kilomètres de virages plus loin, l’un des plus beaux villages que je connaisse, sans me vanter. Près des gorges de l’Ardèche mais loin des nuées touristiques, avec par endroits une terre rouge propice à la syrah. Un vieux château massif, un temple, une église, cinq cafés autrefois, pour moins de 100 habitants. Et des histoires de famille, de racines, que l’on ressasse.

Mes ancêtres étaient partis dans les années 20, pour fuir la misère. Ils étaient «pour paysans» chez d’autres, comme on disait alors : ils n’avaient pas de terres à eux. L’arrière-grand-père s’est retrouvé cantonnier à Paris. Ma grand-mère a grandi sur les bords de la Marne, y a rencontré mon grand-père, que des photos figent à 30 ans, fine moustache, souri