«Toute nation qui ne sait pas manger ou jouir de la vie comme le font les Chinois nous semble grossière et barbare» (Lin Yuang, la Chine et les Chinois, Payot). La cuisine chinoise est à elle seule un univers. En Chine, mais aussi dans l'Asie sinisée et bien au-delà puisqu'elle s'impose partout dans le monde en concurrence favorable avec la food industrielle de style américain. En Chine, se nourrir a été intimement pensé avec la médecine, l'industrie restant de fait à la marge.
Comme en Europe, les cuisines «régionales» chinoises sont nées au XIXe siècle. Elles ne comptent pas moins de huit grandes cuisines souvent regroupées en quatre familles : du Nord-Est (Shandong), du Sud-Est (Jiangsu, Anhui et Zhejiang), du Sud (Fujian et Guangdong) et du Sud-Ouest (Hunan et Sichuan). On y retrouve les oppositions entre Chine du blé, donc des nouilles, au Nord, et du riz au Sud ; entre les cuisines plus salées au Nord, sucrées au Sud, aigres à l'Est et épicées à l'Ouest.
Rareté. Ces classes ont le mérite d'être englobantes et géographiques. Donc, bien pratiques pour le commun des mortels. Mais elles ne disent rien de l'arrangement curieux de ces plats servis à table simultanément, et dans lesquels chacun pioche à sa guise. Là, se joue une pièce plusieurs fois millénaire qui remonterait au XXIe siècle avant notre ère, devant une cuisine peut-être fondée par Peng Zu, au service de l'empereur Yao. La nour