Spécialiste de la jeunesse en Europe, maître de conférences en sociologie à l'Université Paris-Descartes, chercheur au Gemass (1), Vincenzo Cicchelli a travaillé sur la socialisation cosmopolite. Après avoir conduit de nombreux entretiens avec des étudiants du programme Erasmus, il a publié en 2012 l'Esprit cosmopolite, Voyage de formation des jeunes en Europe (2). Il revient pour Libération sur une particularité de la jeunesse de l'Union, à la fois très attachée à sa culture nationale et malgré tout connectée à l'Europe.
Constatez-vous chez les jeunes un sentiment d’appartenance à l’Europe ?
Une chose est sûre, l'Europe fait sens à leurs yeux. Mais pas sous la forme équivalente à l'appartenance à un Etat-nation (un territoire, une langue, une culture). C'est plutôt comme une mosaïque où chaque partie, chaque culture, permet de construire le tableau d'ensemble. Si on en enlève un bout, il manque quelque chose. C'est chaque partie qui permet à l'ensemble d'exister. Cette dimension hétérogène et diversifiée est, aux yeux des jeunes, hautement valorisée. Souvent, l'expérience Erasmus leur a permis de comprendre que l'on peut être différent et pourtant construire quelque chose de commun. Qu'il faut passer par la pluralité pour se trouver des points communs. En cela, Erasmus ressemble à une école grandeur nature. C'est un apprentissage qui leur donne beaucoup d'aisance avec l'interculturel. D'une certaine manière, cela pourrait ressembler au «grand tour» que faisaient les rejetons de la bourgeoise et de la noblesse anglaise au XVIII<