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La carte et le couteau

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Bons baisers de Suisse Chaque jour, une carte postale commentée.
publié le 15 août 2014 à 18h06

La carte préférée des Suisses est, sans doute, la carte postale, souvent une collection d’armoiries et de blasons tenant lieu de toponymes. Ce patchwork d’écussons réunit dans la même coquille politique 8 millions de personnes qui s’appellent «Suisses», avec autant d’ardeur à se différencier. Car ici, au pied des montagnes, on est surtout valaisan, tessinois, bernois ou bâlois.

Le découpage tarabiscoté des frontières cantonales raconte ces calculs politiques alambiqués qu’un dessin des crêtes et des cols montagnards a matérialisé dans le tracé. Mais, là où les Français affichent vins, fromages et recettes régionales, les Suisses plantent leurs drapeaux comme sur les automobiles et les sacs à dos. Une survivance du Moyen Age où le dessin était langage, où les identités étaient transmises de génération en génération par les blasons. Il fallait alors faire face à de grandes entités politiques émiettées, dont le Saint Empire germanique fut le parangon.

Autonomie. Un peu comme le Massif central fut, pour Braudel, «découvert» par le chemin de fer, ce centre haut de l'Europe est né des routes, aux marges des grandes entités de l'Empire romain et, plus tard, de la France, de l'Angleterre et de l'Espagne. Les premiers montagnards ont scellé de nombreux pactes, bien avant celui du Grütli en 1291, reconnu au XIXe siècle comme acte fondateur de la Confédération. Pour garder leur autonomie ou préserver leurs intérêts vitaux ? Mais l