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Camus à Tipaza

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Bons baisers d’Algérie. Chaque jour, une carte postale commentée.
par Sébastien Lapaque, écrivain
publié le 19 août 2014 à 18h06

En se promenant du côté de la Grande Poste à Alger, il avait découvert une carte postale «camusienne» qui l'avait amusé. Il écrivait «camusienne», car ce petit rectangle cartonné dédié à Tipaza, l'antique port romain posé à 80 kilomètres à l'ouest d'Alger, reproduisait une partie de la géographie sentimentale de l'auteur de la Mer au plus près. On y voyait non seulement Tipaza, le site solaire qu'aima tant Camus, mais aussi Hadjout, autrefois Marengo, où Meursault revient pour enterrer sa mère, dans les premières pages de l'Etranger. «…L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir…»

Les noms des villes sur la carte permettaient de savoir qu’elle datait des lendemains de l’indépendance. Marengo était devenu Hadjout ; Dupleix, Damous ; Desaix, Nador ; Montebello, Sidi Rached et Castiglione, Bou Ismaïl.

Vestiges. Il aimait cette carte où était dessinée une femme en maillot de bain, étendue sur une chaise longue, un homme sur une planche à voile et un plongeur sous-marin. Elle célébrait une Algérie sexy et balnéaire, établie au nord de la plaine de la Mitidja, avec le mont Chenoua pour point culminant et la Méditerranée à perte de vue.

Qui croira que cette Algérie n’existait pas ? Il suffisait de savoir la chercher. Elle était cachée derrière les cyprè