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Libération

La pub du labo Abbvie n’y va pas avec le dos de la cuillère

publié le 27 avril 2015 à 19h26

Mal au dos ? Allons donc, vous serez bientôt guéri. N'avez-vous pas vu, ces dernières semaines, une méga campagne publicitaire lancée en grande pompe et dans tous les médias, qui martèle le slogan «Ne lui tournez pas le dos» ? Une campagne en forme de promesse : «Vous avez mal au dos depuis plus de trois mois ? Cinq questions pour identifier l'origine de vos douleurs !» En prime : «Une initiative européenne pour aider les patients à identifier la nature de leurs maux de dos.» A l'appui, un clip, un sigle, NLTPLD, et un kit aussi : «Composé de brochures d'information, il sera également remis aux personnes souffrant d'un potentiel mal de dos inflammatoire.»

Un questionnaire, qui ressemble à un test de diagnostic, est également distribué un peu partout. Et pour les hésitants : «NLTPLD, c'est aussi dans les pharmacies ! Après avoir reçu une information complète pour mieux comprendre et identifier l'origine du mal de dos, les pharmaciens vont pouvoir aider les personnes ayant un mal de dos depuis plus de trois mois à s'interroger sur leur douleur, grâce à un dispositif pédagogique, validé par les spécialistes des pathologies rhumatismales et les associations de patients.» Bref, c'est beau, et c'est tentant.

Mais voilà, le Formindep, association de médecins et de citoyens «pour une formation et une information médicales indépendante», s'est amusé à regarder au plus près cette campagne. Au final, c'est une tout autre histoire. «Il ne s'agit, ni plus ni moins, que d'une campagne de publicité destinée à accroître la demande pour un médicament très cher fabriqué par la firme pharmaceutique qui orchestre cette "publi-information".» Le produit, c'est l'Humira, très coûteux (plus de 13 000 euros par an et par patient), qui vient justement de voir son autorisation de mise sur le marché en Europe étendue à la spondylarthrite axiale. Quant au laboratoire, c'est Abbvie, issu à 100% du groupe américain Abbott.

Le Formindep s'est fait un malin plaisir à dresser les entorses à la vérité dans les slogans de cette campagne. Ainsi, est-il affirmé : «La maladie est sous¬diagnostiquée, elle est plus fréquente qu'on ne le pense.» Ah bon… De fait, la campagne assimile mal de dos et spondylarthrite axiale, forme particulière. «La fréquence de la maladie - spondylarthrite axiale - est surestimée, parfois très grossièrement.»

Le message central est que des personnes atteintes de rhumatismes inflammatoires chroniques «tourneraient le dos» à leur douleur, et ne la signaleraient pas à leur médecin. Et c'est tellement dommage car il existe un traitement… Enfin, il faut des partenaires, en l'occurrence l'Association France spondylarthrites), mais aussi l'Association française de lutte antirhumatismale. Les deux reçoivent des dons généreux d'Abbvie. Bizarre, non ?