La première fois qu’elle le vit, il se moqua légèrement d’elle. Et elle éclata de rire. Le fringant militaire à la plus belle chevelure brun roux de Russie, à la stature plus qu’imposante (tout autant que l’étaient, selon la légende, ses attributs) répondit, à sa demande d’imiter un seigneur de la cour, qu’il en était tout à fait incapable, d’une voix si différente de la sienne que l’assistance en resta figée. Le ton était parfait, l’accent légèrement allemand et l’intonation d’une extraordinaire précision : Potemkine était en train d’imiter la Grande Catherine à la perfection. Et son audace paya, puisqu’elle partit d’un fou rire qui était le premier d’une longue série, l’histoire de leur relation étant marquée entre autres par de grands moments de poilade.
Épisode précédentThérèse Blum, la madone des meetings
Née en 1729 en Poméranie, annexée par la Prusse, Sophie Frédérique Augusta d'Anhalt-Zerbst est fiancée dès ses 15 ans à son cousin, petit-fils de Pierre le Grand, cruel, désagréable et passablement chiant. Si elle laisse à sa mort en 1796 un empire considérablement étendu, l'ouvrant aux influences intellectuelles et artistiques de l'Europe occidentale (elle lit Tacite et Machiavel dans le texte, échange des lettres avec Voltaire, crée des villes nouvelles, ouvre la voie à l'industrie et commandera plus de 4 000 tableaux, bref tout ce qui fait qu'on la surnomm