Le long des berges, une kyrielle de bateaux à l'accostage. Les uns chargés de pastèques, les autres de jarres en provenance des villages alentour. Des camions hors d'âge tentent de se frayer un chemin entre des citernes de mélasse et des bataillons de porteurs. Un peu plus loin, les lavandières tapissent le dallage de la rive de linge bigarré. Il est 8 heures du matin et l'activité déjà frénétique dans le port de Mandalay, la deuxième ville du pays, qui s'étale sur près de deux kilomètres le long de l'Ayeyarwady. L'Ayeyarwady, le fleuve sacré que les Anglais avaient appelé Irrawady parce qu'ils n'arrivaient pas à prononcer le mot birman. Navigable sur près de 1 400 kilomètres, des contreforts de l'Himalaya jusqu'à la mer d'Andaman, dans l'océan Indien, il est à la Birmanie ce que le Nil est à l'Egypte : la principale voie de communication, le creuset de la civilisation. Surtout, il témoigne de l'omniprésence de la religion. Ici, le bouddhisme modèle le paysage et rythme le temps des villes et des campagnes. La junte au pouvoir l'a d'ailleurs compris, qui laisse une totale liberté de culte aux Birmans - la seule sans doute dans ce pays cadenassé. Cela n'a pas empêché, le 26 septembre dernier, 10 000 bonzes de défiler pacifiquement contre la dictature. Les autorités ont réprimé la manifestation. Bilan : au moins une dizaine de morts.
Radeaux de bambous. 4 h 30 du matin. L'heure de la toilette du Bouddha à la pagode Mahamuni, le sanctuaire le plus sacré de Manda