Une journée à lever mon pouce en direction d’Athènes, en vain. Crépuscule, résignation. Dormir sur la plage? Non : je viens de rencontrer Nouredine, un immigré algérien qui me propose de partager son toit. J’hésite, méfiant. Pourtant, j’aime cette belle figure olive, ces yeux cristallins contrastant avec le jais de cheveux crépus. Quand il s’exprime, son accent guttural semble vouloir chanter ; il emballe ses « r » d’un claquement de langue sur le palais et le «comme» devient «qôm» dans les replis de sa gorge. Finalement, emporté par ses manières, je me convaincs que la foi en l’homme est le fondement du voyage ; le ciment des rencontres, et décide de lui faire confiance.
En chemin, lui et ses amis me dévoilent le drame qui se noue chaque jour à Patras. Partis de Kabylie, il y a plus d’un an pour trouver du travail et envoyer de l’argent à leurs familles, ils ont atteint la Turquie en bateau et à l’aide de passeurs ; pour finalement devoir rebrousser chemin et s’échouer au port, misérables et sans réseau, dans une Grèce en crise et très restrictive sur son immigration. Il est 20h. Doucement, le jour tombe sur un théâtre dont la représentation ne peut se donner que dans l’obscurité.
Nous arrivons devant un bâtiment condamné, rehaussé d’une enseigne à moitié effacée. Ces Algériens ont élu domicile dans un bar abandonné. L’intérieur est dévasté ; on me ballade de pièces insalubres en chambres décrépites au son des rats qui font la fête dans les châteaux d’immondices. L’électricit