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Millevaches, mille croix sur un plateau

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Tapis, isolés, bordant les sentiers… Ces vestiges oubliés, qui protégeaient les croyants ou indiquaient le chemin aux égarés, gardent le plateau depuis le Moyen Age.
Sur ce territoire enclavé, chaque croix érigée a une typologie et un emplacement particuliers. (Photo Jérôme Pesnel)
publié le 20 décembre 2013 à 17h06
(mis à jour le 23 décembre 2013 à 10h35)

De Limoges, on accède au plateau de Millevaches doucement. Ici, la montagne culmine à presque 1 000 mètres, mais rien ne se déchire ni ne se brise.

A la belle saison, les prairies déroulent leur tapis vert tendre, assombri par des bouquets de joncs. Elles alternent avec les forêts de feuillus et les rangées serrées des conifères. Au milieu, l’eau s’immisce et serpente, sereine, le long des prés et des rochers. On ne croise personne pendant des kilomètres. Et pour cause : nous sommes dans un des endroits les moins habités de France. Malgré les apparences, sur le plateau, la vie est dure, surtout l’hiver. Le sol pauvre, les habitants isolés.

Ce décor recèle pourtant une multitude de trésors cachés : des dizaines de croix en granit, semées au creux de ses chemins et vallons. Parfois là depuis plus de mille ans, elles racontent le passé de cette montagne désertée : les croyances d’autrefois, en lien avec la terre et l’eau, la lente christianisation du territoire et les chemins de passage au cœur de cette région peu fréquentée.

Photo Jérôme Pesnel

our comprendre cette histoire, il faut imaginer. A l'origine, le paysage n'était pas forestier, il était recouvert de landes. Humides dans les creux, elles formaient des tourbières. Sèches sur les sommets, elles se paraient de genêts et de callune (une espèce de bruyère). Une terre sans arbres, habitée par les brumes et les vents. D'ailleurs le nom de Millevaches n'a rien à voir avec l'animal. Il viendrait du latin, composé du nom melo,