La route en lacets est un fin serpentin qui festoie au-dessus du précipice. Plusieurs centaines de mètres plus bas, la Méditerranée scintille quelle que soit la saison, inondant de lumière les terres qui la surplombent. Jadis fertiles, elles sont peu à peu envahies d’un maquis vert sombre où poussent myrtes, arbousiers, cistes et figuiers de Barbarie. C’est juste avant le village de Canari, sur le côté ouest du Cap Corse, qu’apparaît l’Auberge du Chat qui pêche, comme posée le long de la départementale 80.
Une enseigne de matou pêcheur se découpe sur la façade de pierres sèches. Le patron, Jean-Michel Vincentelli, une grande gueule de tatoué et d’ex-motard, a de prime abord cette raideur de Corse à qui on ne la fait pas. Une fois la glace brisée, il deviendrait presque bavard. Rien ne lui plaît plus que de parler de son métier, du terroir, de son île, du gaspillage des talents qu’on y fait et des belles âmes travailleuses qui s’y trouvent encore. Pour un peu, il se lancerait dans une démonstration politique. On le retient, mieux vaut évoquer le Chat avec cet homme qui n’a plus que des chiens, des dogues de Bordeaux tendres comme des figues bien mûres, qui semblent passer leur temps à faire la sieste sur la route, ce qui oblige les voitures à ralentir et les contourner avec précaution. Il y a un côté Astérix en Corse dans le regard (aussi prudent qu’envieux) de certains touristes sur la nonchalance de ces chiens, Berlioz et Olga, reflet de ce que vivent ici les hommes.
Chez le «cuissonnier»
L’auberg