Menu
Libération
LES AVENTURES D'UN TOURDUMONDISTE

Cambodge, fragment de discours d’un amoureux

Article réservé aux abonnés
Tuol Sleng puait la mort. La tristement fameuse école, réaménagée en prison politique S-21 par Pol Pot en 1975, avait pour but de «détenir, interroger, torturer et tuer après confession» les opposants du Kampuchea Démocratique…
The Tuol Sleng Genocide Museum is a museum in Phnom Penh, the capital of Cambodia. The site is a former high school which was used as the notorious Security Prison 21 (S-21) by the Khmer Rouge regime from its rise to power in 1975 to its fall in 1979. (Christian Haugen - Flicker)
par Jean-Baptiste Pouchain
publié le 13 mai 2014 à 9h21

… Conjointement, les révolutionnaires Khmers Rouges décrétaient l'«Année Zéro», fermaient les frontières, abolissaient la monnaie et ordonnaient l’exode forcée des habitants de Phnom Penh. Les idées prônées par Pol Pot, tout à fait ancrées dans leur époque, continuaient aujourd’hui de choquer le monde par leur caractère primaire. Officiellement estampillé «socialisme agraire», le régime de l’Angkar transforma le pays en dictature marxiste-maoïste radicale. Il s’agissait ni plus ni moins que d’une nouvelle ère agricole, hors des villes et dénuée de toute forme d’intelligentsia ou de contact avec l’extérieur : les premiers massacrés furent les membres de l’ancien gouvernement, les intellectuels (porter des lunettes suffisait pour faire partie du club) et les étrangers présents au Cambodge pendant la révolution. Pol Pot lui-même avait été éduqué à la Sorbonne parisienne, où il était rentré en contact pour la première fois avec les idées communistes et avait développé un amour des poètes romantiques.

Par la suite, les travaux forcés dans les champs, la maladie, les famines et les exécutions en masse orchestrées par l’Angkar soulagèrent le pays d’environ 1,8 million d’habitants en à peine quatre ans, soit 20% de la population totale.

Les méthodes utilisées par les Khmers Rouges pour tuer relevaient de la barbarie primitive : Pol Pot n’avait pas les moyens d’un Hitler, et les balles étaient précieuses, il fallut donc se satisfaire de briser la nuque des prisonniers avec un essieu, d