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Libération
Villes imaginaires 5/6

Shangri-La, lamas de cocagne

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La cité tibétaine inventée par James Hilton est désormais un concept marketing chinois.
Songzhanlin Temple, Shangri-la (Yunnan) (Ed Meister / Flicker)
publié le 16 juillet 2014 à 18h06

Il faut franchir les montagnes escarpées de l'Himalaya, affûtées par les vents tranchants. Il faut dégringoler une fois, puis deux, les mains ensanglantées, le dos lourd, avant de gravir à nouveau le chemin sinueux qui mène au défilé. Traverser la brume comme une nouvelle naissance. Se laisser envelopper, léger. Et apercevoir Shangri-La, l'étape rêvée de tous les voyageurs. Cette lamaserie coupée du monde a été révélée par James Hilton dans son roman Horizon perdu. Elle constitue une retraite spirituelle pour les âmes tourmentées qui pansent leurs plaies autour d'un bol de thé brûlant. Si le marc de café dit l'avenir torréfié, l'eau parfumée et ses volutes dissipent le passé.

Jouvence. Inspirée par le mythe de Shambhala, contrée fabuleuse du bouddhisme tibétain, la description faite par Hilton en 1933 avait tout pour envoûter les lecteurs occidentaux, très intrigués par cette région d'Asie et ses croyances. Quasi inaccessible, la magnifique Shangri-La est un idéal pur et paisible, une échappatoire quand la Seconde Guerre mondiale frappe à la porte de l'Histoire. L'Europe troublée n'ose rêver du quotidien idyllique que connaît ce bout de paradis terrestre.

La lamaserie domine une splendide vallée où s’étalent un camaïeu de vert piqué de tubéreuses, des terres fertiles, des étangs couverts de lotus et des herbes hautes, seulement défiés par la blancheur des neiges éternelles.

Peu d’élus atteignent Shangri-La, sinon quelques marchands