Longtemps marginalisé, le secteur du tourisme se redresse après une décennie catastrophique. Et aujourd’hui, l’objectif de 20 millions de visiteurs pour les Jeux olympiques de Tokyo de 2020 n’est plus si farfelu.
En un an, leur nombre a en effet bondi de 3 millions pour atteindre le total inédit de 13,41 millions en 2014, soit plus du double de 2011, année marquée par la triple catastrophe du 11 mars (séisme, tsunami et accident nucléaire). Les stigmates «n'ont pas complètement disparu, mais le redressement est solidement engagé», et les craintes largement dissipées, note l'Organisation nationale du tourisme (JNTO).
«Nous avons beaucoup expliqué qu'à Tokyo et dans les principales zones touristiques, les niveaux de radiations sont absolument insignifiants», relate un responsable du JNTO, Mamoru Kobori. «Les gens ont compris que voyager, manger et même vivre ici ne posait aucun problème, si on évitait une zone très restreinte autour de la centrale nucléaire de Fukushima.»
Visa accessible et yen au plus bas
Alors le Japon s'enflamme : pourquoi pas 15 millions en 2015 et même 20 millions à l'heure des JO de 2020 ? «Cet objectif est devenu réaliste», a estimé le ministre du secteur, Akihiro Ota.
Quand l’économie tangue, le tourisme (1,8% du PIB) apporte une manne bienvenue : l’an passé, c’est grâce aux visiteurs étrangers, dont les dépenses ont doublé par rapport à 2013, que les grands magasins ont résisté à la conjoncture maussade. Principal atout de l’archipel : un yen faible, sous l’impulsion de la stratégie «abenomics» lancée fin 2012. Depuis l’arrivée au pouvoir du Premier ministre Shinzo Abe, la devise nippone a perdu plus de 20% face à l’euro, et encore plus face au billet vert (-40%).
L'occasion de découvrir à prix abordables une destination réputée chère. «Ce qui a beaucoup influencé notre décision, c'est que 100 yens ne coûtent que 85 cents de dollar», confirme Jorge Santillan, originaire de Buenos Aires, qui a du coup changé ses habitudes, délaissant exceptionnellement Miami pour Tokyo.
Les Asiatiques (Taïwanais, Sud-Coréens et Chinois dans le trio de tête) sont eux aussi avides de découvrir le pays, malgré les querelles historiques et territoriales, d’autant qu’il est désormais plus facile de décrocher un visa.
Complet à Kyoto
Se délecter des mets nippons, goûter au mode de vie traditionnel dans un ryokan (auberge), se prélasser dans un «onsen» (source volcanique chaude) : voilà les activités favorites des touristes, raconte Mika Hatakeyama, chef de produit Japon chez Voyageurs du monde (VDM). «Enchantés par la gentillesse et l'hospitalité, ils adorent y retourner et en parlent à leur entourage, d'où un effet de bouche-à-oreille.»
«Le Japon, qui apparaît en outre comme une destination très sûre, cartonne», se réjouit la voyagiste qui évoque une envolée du chiffre d'affaires de 40% entre 2013 et 2014.
Difficile cependant de détourner les visiteurs du circuit classique Tokyo-Kyoto-Osaka, où les hébergements et transports sont pris d'assaut. «A Kyoto, cela pose problème, tout est complet plusieurs mois à l'avance», déplore Mika Hatakeyama.
«Nous avons conscience qu'il faut poursuivre les efforts pour renforcer les infrastructures», ainsi que l'accueil en langues étrangères, reconnaît-on au JNTO. «Les demandes de permis de construction d'hôtel sont en pleine expansion et selon nos calculs, il devrait y avoir 10 000 chambres supplémentaires rien qu'à Tokyo d'ici à 2020», promet M. Kobori. Et d'encourager, également, les voyageurs «à sortir des sentiers battus» via le lancement d'itinéraires dans un Japon rural aujourd'hui peu exploré.