Menu
Libération
Hop, hop, hop...

Marseille, le printemps en pente douce

Courts séjours en Francedossier
Je résume: tu as deux jours (voyage compris!) pour crapahuter dans les calanques, te faire griller sur la plage, visiter le Mucem, grimper à Notre-Dame-de-la-Garde, communier au Vélodrome et tester le pastis bleu. Le tout à la coule, hein?
Running touristique à Marseille (Photo Olivier Monge. Myop)
par Stéphanie Harounyan, à Marseille
publié le 25 mai 2015 à 17h26

Je résume: tu as deux jours (voyage compris, c’est vraiment un court séjour !) pour crapahuter dans les calanques, te faire griller sur la plage, visiter le Mucem, grimper à Notre-Dame-de-la-Garde, regrimper dans le quartier du Panier, communier au Vélodrome et tester le pastis bleu. Le tout à la coule, hein, parce qu’on est à Marseille et qu’il commence à faire chaud ici… Un détail, tout de même : la cité phocéenne étant deux fois plus étendue que Paris, il va falloir y aller au pas de course. Ça tombe bien, Christophe, coureur marseillais et créateur du site internet Run & Visit Marseille (1), a concocté pour toi des balades touristiques commentées en mode running.

Ta panoplie : des baskets de base (on est là pour visiter, pas pour se faire mal), un short (la course fait transpirer, c’est scientifique), une bouteille d’eau, des sous (pour la ligne d’arrivée).

Hop hop hop. Christophe a mis au point plusieurs itinéraires, au choix selon le niveau des coureurs. Tu penses bien que j'ai testé pour toi le plus court, soit tout de même sept kilomètres de montées et descentes à travers le centre-ville. J'imagine ta moue dubitative, j'avais la même en arrivant sur la ligne de départ, tout près du métro Vieux-Port. J'ai même failli partir après avoir levé les yeux, découvrant mon reflet en short dans l'ombrière créée en 2013 par Norman Foster. Christophe a habilement détourné l'attention vers une plaque posée à l'entrée de la bouche de métro. C'est là, dixit la plaque, que les Grecs de Phocée auraient posé le pied pour la première fois sur le site où ils créeront Massalia, en 600 avant J.-C.

Les premières foulées sont les plus dures, d’autant que ça démarre en pente, direction le Jardin des vestiges. Le site, mis à jour en 1967 lors de la construction du centre commercial voisin, abrite les ruines de l’ancien port antique de la cité. On admire les pierres à travers les grilles avant de bifurquer à gauche. En passant devant l’Hôtel de Ville, tu découvriras peut-être comment font les agents municipaux pour passer du rez-de-chaussée au premier étage, vu qu’il n’y a pas d’escalier. Pas le temps de réfléchir à ce casse-tête architectural, Christophe pointe du doigt ce qui est présenté comme la seule difficulté du parcours : la montée des Accoules, rampe de lancement vers le cœur du quartier historique de Marseille, le Panier. Tu l’auras deviné, la montée des Accoules, ça monte… Respire un bon coup et ne compte surtout pas les marches ! Pense simplement à garder les yeux ouverts : les ruelles étroites, retapées pour la plupart, ont gardé leurs charmes de carte postale. Linges aux fenêtres, chaise devant la porte, minots qui jouent… Tout y est, même les jolies boutiques à souvenirs. Sauf que toi, souviens-toi : tu ne dépenses pas, tu te dépenses.

La virée dans le Panier a son lot de récompenses, comme le passage devant la superbe coupole de la Vieille Charité, construite au XVIIe siècle pour accueillir mendiants et pauvres de la ville. Un petit crochet par le Bar des Treize Coins, désormais fameux pour avoir servi de modèle au Mistral de Plus belle la vie, et c'est parti pour la descente jusqu'à la rue de la République, sympathique ligne droite en pente douce ce qui, tu en conviendras, est une excellente nouvelle à ce stade de la course.

Dentelles. Alors que tes pieds commencent à manifester leur désaccord, le coach sort sa botte secrète : l'arrivée via la rue Mazenod sur l'esplanade de la Major. La cathédrale à rayures du XIXe siècle attire aussi bien les amateurs d'architecture que les boulistes qui squattent son parvis. Attention, spoiler : en tournant la tête à droite, la ville déploie ses charmes - la mer, les grands ferries partant pour le Sud, le palais du Pharo perché sur sa colline au loin et, à quelques foulées seulement, la Villa Méditerranée et le Mucem. Les dentelles du musée agissent comme un aimant : tu ne sens plus tes jambes, mais ton cœur bat plus vite quand, arrivé sur le J4, au pied du bâtiment, tu rattrapes tout juste le soleil en train de se faire la belle.

La pause parmi les pêcheurs du soir reste mon moment préféré. Peut-être aussi parce que Christophe a sorti quelques figues sèches de son sac pour tromper la faim. La soif, elle, ne s’est pas laissée faire : on a fait l’impasse sur le retour par l’église Saint-Laurent, qui offre pourtant un point de vue magique sur la rade, pour revenir par le Vieux-Port. Avec, en guise de ligne d’arrivée, une table dans un coin des Buvards (2), le bar à vin caché derrière les quais. La patronne n’a même pas tiqué à la vue de nos mines dégoulinantes. Deux ou trois étirements et un relais cuvée des Galets-planche de charcuterie effaceront tes dernières courbatures.

Et au cas où tu hésiterais encore : j’ai aussi testé le pastis bleu. Aucun intérêt.

(2) Les Buvards, 34 Grand-rue, 13002 Marseille.