En octobre, on lance la saison Picasso. Le maître est (encore) à l'honneur cette année, sur les cimaises du Grand Palais (1), au musée national Picasso totalement rénové qui a rouvert ses portes après cinq ans de travaux (et une grosse polémique) et dans les librairies, avec deux livres que publient coup sur coup, les éditions Hugo: Dans l'ombre de Picasso (2), mémoires d'un de ces plus proches collaborateurs dans le sud de la France et Picasso et Paris (3), et l'on en oublie sûrement d'autres…
Dans le premier, Dominique Sassi qui a travaillé durant vingt ans en compagnie du maître dans l'atelier Madoura à Vallauris, se souvient avec émotion de ses journées de travail sur la céramique avec Pablo Picasso et tout d'abord de sa première rencontre avec le peintre, «un jour clair de juillet. J'étais un tout jeune homme et la poterie était ma passion.» «Témoin privilégié de ces années, il révèle à travers ce livre l'immense bonheur de travailler aux côtés de celui qui a magnifié la terre dans la chaleur des fours et le "parfum de l'argile"», écrit Claude Picasso dans la préface.
Le second livre propose une balade dans la capitale où le génie de l’art moderne séjourna près de 46 ans, de sa première visite à Paris pour l’exposition Universelle jusqu’en 1954, année où il décide de s’exiler dans le sud de la France. Une promenade intime entre Montmartre et Saint-Germain-des-Prés en passant la Boétie et les champs Elysées.
Guillaume Robin a recensé pendant deux ans ces lieux puis les a rassemblés sous le titre, Picasso et Paris. Balades sur les pas de l'artiste, un ouvrage à mi-chemin, entre le guide et le livre d'art. L'auteur nous emmène donc sur les traces du peintre, musées, ateliers, appartements, mansardes, cafés, restaurants… en ne retenant bien sûr que ceux qui ont eu une importance sur sa vie personnelle et son œuvre artistique.
De Montmartre, Picasso, dira à André Salmon, «tu sais bien que nous n'avons été heureux qu'à Montmartre». Ce quartier illustre pour lui la grande épopée du mouvement cubiste, c'est ici aussi qu'il connaîtra sa première véritable histoire d'amour, avec Amélie Lang, plus connue sous le nom de Fernande Olivier, qui était modèle professionnel et avec laquelle il passait ses soirées au cabaret du Lapin Agile, non loin du Bateau-Lavoir. Cette grande maison, dont on doit le surnom à Max Jacob, abrita outre Picasso, de nombreux artistes, dont Van Dongen, Mac Orlan, Juan Gris. Il ne reste malheureusement plus rien de ce haut lieu de la peinture, dans lequel Picasso a peint, Les Demoiselles d'Avignon, puisqu'il fut ravagé par un incendie en 1969, peu de temps après avoir été classé monument historique.
Après Montmartre, Picasso va fréquenter Montparnasse et ces Montparnos, Apollinaire, Derain, Modigliani, accélérant ainsi la notoriété du vieux Mont. Les adeptes de l’art moderne, Léger, Chagall, Brancusi… vont se regrouper dans un ensemble d’ateliers très célèbre appelé, La Ruche, tandis que le peintre catalan, lui, s’installera dans un atelier boulevard Raspail puis rue Victor Schoelcher.
Une des dernières traces de Picasso à Paris, avant qu’il ne parte définitivement pour le sud de la France fut l’Atelier des Grands-Augustins, qui avait appartenu au comédien Jean-Louis Barrault. Ce lieu où le maître a peint son célèbre Guernica pourrait devenir une résidence hôtelière fermée au public. Un comité de soutien s’est constitué pour dénoncer ce projet immobilier.
Richement illustré et très documenté, «j'ai lu près de 70 livres sur le sujet, parcouru tous les sites. Je me suis pris au jeu de cet inventaire», souligne l'auteur, l'ouvrage entend, lui aussi, ne pas laisser disparaître les dernières traces de l'esprit Picasso dans la capitale.
(1) Picasso.mania au Grand Palais, jusqu’au 29 février 2016.
(2) Dans l'ombre de Picasso. 20 ans aux côtés de Picasso, de Dominique Sassi. Editions Hugo Doc, 17 euros.
(3) Picasso et Paris. Balades sur les pas de l’artiste, Guillaume Robin. Editions Hugo Image, 264 p.19,95 euros.