On avait presque oublié que les Maldives, archipel de l'océan Indien posé sur l'équateur à 700 km du Sri Lanka, n'étaient pas qu'une collection de cartes postales de sable blanc, d'hôtels sur pilotis ou de couchers de soleil en quadrichromie, mais un vrai pays, avec son histoire, ses coutumes, sa culture… Après avoir été écrasée durant trente ans par une dictature qui imposait l'apartheid entre étrangers et locaux, cette guirlande de 1 200 îles et 350 000 habitants se visite désormais librement, en dehors des luxueuses îles-hôtels et de leurs packages all inclusive pour lune de miel. Et sans se ruiner, à condition d'avoir un peu l'esprit pionnier, car le pays s'ouvre à peine au «tourisme normal». Balade, hors des sentiers battus.
1 - Malé, la frénétique
Capitale la plus densément peuplée au monde, Malé est une Bombay en miniature qui accueille 150 000 personnes sur un mouchoir de poche : on en fait le tour en trente-cinq minutes en courant. Avant l’aube, car ensuite même marcher est une gageure, tant les rues étroites sont livrées à une circulation infernale. On dirait que les Maldiviens vivent sur leur scooter, cheveux au vent, lunettes de soleil sur le nez et smartphone à la main, n’en descendant que pour s’asseoir à une terrasse ou visiter la famille, pendant que les 50 000 travailleurs émigrés du Bangladesh font tourner l’économie. Deux jours suffiront pour épuiser le charme de la ville entourée d’une digue artificielle et de ses satellites, l’île-poubelle, l’île-pique-nique, l’île-prison, l’île-banlieue… Les hôtels étant aussi chers qu’à Paris, loger chez l’habitant est une solution aussi sympathique qu’économique, en passant toutefois par les sites de réservation en ligne. Car derrière les panneaux «rent a room» ne se cachent en général que des réduits humides.
2 - Les îles locales
Pour les séjours d'une semaine ou deux, rester dans l'atoll de Malé permet de visiter la capitale et de passer du temps sur les îles voisines, qui bien que desservies par un ferry quotidien, offrent un calme saisissant après la frénésie de la capitale, et des lagons qui n'ont rien à envier à ceux des hôtels 5 étoiles situés à quelques encâblures. Si vous avez plus de temps, tentez l'aventure et partez à la découverte des autres atolls. Tous pareils et à la fois tous différents. De larges allées de sable blanc, des hamacs accrochés aux cocotiers, des jardins luxuriants, des habitants qui se laissent vivre au rythme de la pêche, des récoltes et des fêtes… Pour vous loger dans l'une ou l'autre des 200 îles habitées éparpillées dans l'archipel des Maldives, vous trouverez des guesthouses, même si, de l'aveu d'un promoteur, les Maldiviens ont encore du mal «à comprendre ce que veulent les Européens». En attendant la sortie de guides de voyage qui donneront des adresses locales, il faut suivre son instinct pour trouver accueil chaleureux et fenêtre ouverte sur les arbres fruitiers. Dans les îles les plus reculées, la municipalité a parfois des chambres réservées aux hôtes de passage, et les habitants sont prompts à inviter chez eux ou sur leur bateau.
3 - «Seaplane» ou «speedboat»
Le gros souci, aux Maldives, c'est le transport. Dans les années 80, il fallait souvent une semaine aux habitants pour se rendre à la capitale. Aujourd'hui, les seaplanes (hydravions), les speedboats et les hors-bord vous emmènent n'importe où. Des vols intérieurs permettent, par exemple, de rejoindre l'île méridionale de Gan pour 80 euros. Restent les dhonis, grands bateaux de bois qui transportent fret et passagers. Pour vous rendre à l'autre bout de l'atoll de Malé, il vous en coûtera 3 euros pour deux heures de promenade en mer. Pour les autres atolls, le voyage, folklorique, peut s'étirer sur dix-huit heures. Certains, comme Faafu, sont desservis par un ferry hebdomadaire - qui se révèle être une vedette avalant les 120 km en deux heures et demi, pour 30 euros et un bon mal de dos.
Bien se renseigner sur les horaires sur le site MTCC, sous peine de rester coincé une semaine dans un coin perdu. Autre option : emprunter les staff boats, ces dhonis qui transportent les employés des resorts, où trouver une place sur une vedette affrétée par un particulier.
4 - Masque de plongée et cape de pluie
Une fois installé, place aux vacances… Partout, le sable, issu des coraux, est doux et blanc, l’eau turquoise et les cocotiers généreux. Depuis le phénomène El Niño de 1998, une grande partie des coraux situés à moins de 3 mètres de profondeur ont blanchi, et les poissons ont déserté les jardins sous-marins sans vie. Il reste quand même de jolis coins à découvrir avec un masque et un tuba, à quelques brasses dans le lagon ou en kayak. Côté pleine mer, de très réputés spots de surf. Quelle que soit la saison, la température de l’air oscille autour de 30 degrés, jour et nuit, et celle de l’eau autour de 29 degrés. Seul hic : il pleut beaucoup, et la saison (presque) sèche ne dure que de décembre à mars. Cela dit, pas de panique, les belles journées sont fréquentes, et il fait plutôt plus beau au sud.
5 - Ni bière ni bikini
Les Maldives, peuplées depuis sept mille ans, sont musulmanes et pétries de superstitions. De nombreuses mosquées sont d’anciens temples hindous : construites en bois et en corail, elles sont reconnaissables à leurs tapis posés de travers en direction de La Mecque. Si tout est permis dans les îles-hôtels, le reste du pays est régi par un mélange de droit commun et de charia. Les femmes sont priées d’éviter les débardeurs et les shorts, et de porter un bermuda et un tee-shirt pour se baigner - parfait contre les coups de soleil. Cela dit, nul ne vous arrêtera pour une épaule nue, même si les plus vieux et les plus conservateurs des habitants s’agacent des Chinoises en minirobe.
Dans quelques îles locales très fréquentées, comme Maafushi, une «bikini beach» a été aménagée pour les étrangers - qui présente l'immense avantage d'être propre. En revanche, il est impossible de trouver de l'alcool, en dehors du pub plutôt déprimant de l'Hulhule Island Hotel près de l'aéroport, et, bien sûr, des resorts. Ces derniers proposent des forfaits «journée», qui vous donnent accès aux plages, piscines, spas, restaurants et donc, bars. Une plongée dans le luxe qui vous délestera d'une centaine d'euros. Mais on peut céder quelquefois aux charmes de la carte postale.