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Voyage

Le Sancy, massif sans soucis

Trouver une destination pour une famille avec enfants rend tout projet de départ épuisant avant même d’avoir mis un pied dans le train. Heureusement, il y a l’Auvergne qui nous ouvre ses bras enneigés. Pour éviter les mauvaises surprises, on a testé en compagnie de Pim (6 ans), Pam (3 ans) et Poum (7 mois).
A l’auberge le Buron du Col, le 29 décembre à Saint-Morand. (Photo Pascal Aimar. Tendance Floue pour Libération)
par Maïté Darnault, Envoyée spéciale dans le Sancy
publié le 12 janvier 2018 à 18h06

En 2016, l'Auvergne a fait son entrée dans le «best of» de Lonely Planet. Classée sixième devant Hawaï, la région est, selon la critique, un «joyau méconnu» qui «se réinvente sans céder une once de son charme rural». Fichtre, en ces mois d'hiver neigeux, annulez vos billets pour le Pacifique et misez sur ce «cœur de France» palpitant. La distance s'étant sérieusement raccourcie, vous ne disposez plus d'excuse valable pour laisser les enfants aux grands-parents car l'Auvergne est aussi une destination familiale. Cap donc sur le massif du Sancy, situé au sud-ouest de Clermont-Ferrand.

Bain détente et jeux d’enfants

Soit Pim, Pam et Poum, respectivement 6 ans, 3 ans et 7 mois, qui forment un farouche aréopage en matière de divertissement. Et un supplice acoustique durant tout trajet dépassant l'heure, quel que soit le moyen de transport. Une fois atteinte la petite ville de la Bourboule, vous avez donc la tête comme une courge et vous rêvez de vous délasser. Sur la rive de la Dordogne, les Grands Thermes vous tendent les bras. Massage bébé, bain détente et douche pulvérisée avec vos petits : trois formules permettent de profiter en famille du spa, dans un espace distinct de celui des curistes. L'eau chaude a ramolli Pim et Pam, et bébé Poum gazouille : tout baigne. Station thermale de premier plan depuis la fin du XIXe siècle, la cité a troqué après-guerre sa clientèle mondaine pour des wagons d'enfants souffrant d'asthme ou de problèmes de peau, devenant le premier lieu de cure pédiatrique d'Europe jusque dans les années 2000. Edifiés en 1877 avec des roches volcaniques, coiffés de coupoles néobyzantines, les Grands Thermes de la Bourboule symbolisent le faste Belle Epoque dont témoignent encore quelques façades du centre-ville.

Situé non loin, le parc Fenestre date de cet âge d’or de l’Art déco. Un jardin à l’anglaise de 12 hectares abrite une pièce d’eau et une collection de plantes vivaces, mais surtout un plateau de jeux d’enfants (modules avec toboggans XXL et trampolines) qui vous assurera un moment de saine tranquillité à quelques pas, au pied des séquoias géants. En hiver, les pelouses couvertes de neige peuvent se transformer en pistes douces de luge, et si vous parvenez à négocier avec votre moitié un intermède solo, le parc est également le départ de trois itinéraires de trail vers le plateau de Charlannes.

Crêtes et goûter

Le Puy du Sancy, qui culmine à 1 886 mètres, est le plus haut volcan de France métropolitaine. Par temps clair, on dit qu’il est possible d’apercevoir d’en haut un septième du territoire hexagonal. Le panorama sur les vallées glaciaires et les crêtes abruptes des massifs environnants est l’occasion de réviser vos rudiments de géologie avec Pim, qui se passionne depuis peu pour les cratères et autres histoires de magma. Soyons honnêtes, faire de la montagne avec des enfants revient bien souvent à les porter au bout de 200 mètres. Or la dizaine de kilos gigotant arrimée à votre dos est de nature à plomber votre enthousiasme une fois le sommet atteint. Pour venir à bout du Sancy, offrez-vous un aller-retour piéton dans le téléphérique qui part de la station de ski du Mont-Dore. Le trajet dure quatre minutes. Pour couronner cette authentique session d’alpinisme familial, vous pourrez prendre le goûter au restaurant d’altitude accolé à la gare d’arrivée. L’été, on prolonge la balade en empruntant l’escalier de bois qui conduit au pic du Sancy en vingt minutes. Les 864 marches à gravir sont un prétexte à l’effort, même si Pam ne sait encore compter que jusqu’à trois.

Suite parentale et pulka

Autre départ de rando, le col de la Croix-Morand, à 1 401 mètres, est une étape cruciale car s’y trouve le Buron du Col, un gîte fort sympathique. Dans le Massif central, les burons sont ces bâtiments de pierre, couverts de lauzes ou d’ardoises, destinés à loger troupeaux et bergers durant l’estive. Beaucoup ont été reconvertis pour l’accueil touristique. Outre deux petits dortoirs de trois lits superposés chacun, le Buron du Col propose une chambre d’hôte qui occupe tout le dernier étage. La suite parentale est jouxtée par une salle de bains et un salon privatif, transformable en chambre pour les enfants. Et, merveille, le babyphone passe jusqu’aux combles : vous pouvez mettre Poum dans son lit parapluie quand elle demande grâce à l’heure des vêpres, et aller en bas prendre l’apéro tranquille au coin du feu. Au menu, des plats simples et solides, sur lesquels Pim et Pam ne chipotent pas : omelette, assiette du randonneur ou assiette de buron, tartines gratinées, truffade. Les desserts maison - crêpes, gaufres, tartes et pain perdu - sont aussi servis au goûter. Pour s’ouvrir l’appétit, faites un coup de luge ou un petit tour en raquettes. Le gîte en loue, ainsi qu’une pulka (un traîneau couvert d’un duvet), dans laquelle vous pouvez trimballer les deux plus jeunes.

Pâte pressée et mégalithes

C’est bien connu, le repas préféré des gamins, c’est le fromage. Direction la ferme de Lambres pour tout savoir sur la fabrication du Saint-Nectaire. On peut visiter l’exploitation, déguster et laisser courir les mômes sans craindre la route à côté (le chemin est impossible à trouver sans GPS). Près de 12 litres de lait de vache sont nécessaires pour faire une seule de ces tomes à pâte pressée non-cuite. Elles ont longtemps été une affaire de femmes, cantonnées à la transformation quand les hommes s’occupaient de la traite et du fourrage. L’affinage dure au moins un mois. Pendant les deux premières semaines, les fromages sont régulièrement lavés à l’eau salée, retournés, frottés, pour faire fleurir la moisissure. C’est elle qui donnera à la croûte sa belle couleur de menhir. Justement, le village de Saint-Nectaire est célèbre pour ses mégalithes. Le plus accessible est celui du parc proche du casino. Bien conservé, ce dolmen, appelé Palet de Samson, trône proche de jeux d’enfants et des vestiges d’une vieille tour de pierre. Un décor fantastique pour nos Ostrogoths.