Se lever un peu avant l’aube. Regarder le ciel qui rosit puis s’orange à l’est du côté de la pointe de la Galère où finit de rouiller un vieux bateau de guerre. Scruter le trait sombre de la côte, ses lumières orangées dans le petit matin qui blanchit puis bleuit. Ecouter le murmure doux de la mer, le premier chant timide, un brin aigu d’un oiseau, le tintement du carillon accroché à une branche d’arbousier. Humer l’air épais, humide, rempli des parfums lourds du maquis. Arroser les plantations incertaines de la veille sur cette terre noire qui ne fait qu’une mince couche sur le rocher dur comme le fer. Puis emprunter le raidillon pentu retrouvé dans les broussailles. Encombré de l’attirail de pêche qui ne promet jamais. Direction la crique des Moines dont on reviendra peut-être avec une poignée de petits poissons qui finiront par faire, au fil des jours, de quoi confectionner la soupe. Mais peu importe, on est tous les petits jours le pêcheur du dimanche, le béotien de la canne et du bouchon qui vient avant tout tremper son fil dans un océan de solitude, un bout du monde où les cigales font un boucan d’autocuiseur.
Pour nous, la seule pêche miraculeuse qui vaut est celle de la quiétude retrouvée sur l’île du Levant qui forme avec Port-Cros et Porquerolles les trois îles d’Or posées au large de Hyères, dans le Var. Qu’importe si l’on revient bredouille. De toute façon, il y aura le bateau des pêcheurs matinaux qui viennent vendre leurs poissons dans le port minuscule.