Samedi
C'était crade et malsain
2h25 du matin. Il fait doux, je viens de quitter un ami à Belleville, je voudrais rentrer à pied chez moi (dans les Halles) et tout à coup j'ai un peu peur. C'est stupide. Dans les années soixante, je rentrais souvent à pied de la cinémathèque de Chaillot à la Cité universitaire. Les villes sont moins sympathiques qu'avant. J'arrête un taxi. Je reconnais tout de suite la musique (j'ai le disque moi aussi) et je dis au chauffeur: «Mais c'est Akbala El Leil, chanté par Oum Kalsoum!» Vaguement épaté, il rit: «Vous voyez, je ne suis pas un terroriste. D'ailleurs, je suis marocain.» Et c'est reparti: Bush Junior, Ben Laden, le bien, le mal, les Twin Towers... Je n'ai jamais aimé les Twins Towers: on ne va pas, dans la foulée, devoir aussi aimer l'architecture des bâtiments parce que des personnes y ont été massacrées. «Vous étiez où, le 11 septembre?», demande le chauffeur. Je dormais, j'ai dû sortir du lit vers sept heures du soir (j'écris la nuit). Le répondeur était saturé. Une quinzaine de messages m'informaient. Mal réveillé, abasourdi, j'ai été submergé. C'était crade et malsain.
3h du matin. Des fax sont là. Au Texas, un Sikh a été tué, on l'avait pris pour un Arabe. Autre fax, de Montréal: «La pauvreté du vocabulaire de Bush le rend accessible aux plus attardés de ses compatriotes et il fait l'unanimité. Il a des métaphores de chasseur du dimanche.» Je réponds. Mes amis m'appellent François le Faxeur.
Dimanche
«Ce rien m'intéresse»
Parmi tous mes