Sept ans après sa série Femmes d'Islam, Yamina Benguigui arpente les sentiers du désir et de la jouissance. Et, comme dans Mémoires d'immigrés (1997), elle veut transgresser les silences, notamment ceux qui, au Maghreb et dans les pays de l'exil, entourent la sexualité. Elle déambule cette fois dans le Jardin parfumé, titre de l'équivalent arabe du Kama Sutra. Un livre signé de l'imam Sidi Mohammed al-Nafzaoui. Par la voix de l'anthropologue Mohamed Lasly, la réalisatrice décrit la permissivité de la civilisation arabo-musulmane entre les IXe et XVIe siècles. Et comment les religieux, le mufti Al-Nafzaoui en est un exemple, possédaient la légitimité d'énumérer «avec exagération» les positions sexuelles (de l'inclinée à la balançoire). De dresser une liste exhaustive et évocatrice des noms donnés au sexe de l'homme : le clapoteur, le fouilleur, le perforateur, le tinteur, la colombe, le libérateur, etc.
Ensuite, délicatement, elle soulève le voile sur une société contemporaine dans laquelle filles et garçons veulent aimer mais n'arrivent pas à briser les tabous.Elle interroge des étudiants marocains sur l'amour. Ils lui répondent relations sexuelles réservées : «Si tu couches avec une fille, c'est cinq ans de prison ou le mariage.» Parlent de ce piège dans lequel ils sont enfermés, entre le modèle européen et les versets coraniques qui stipulent que toute relation doit être encadrée par la religion. De ces cuisses féminines entre lesquelles ils se masturbent pour préserver une