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Libération
Critique

France, terre promise

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publié le 16 février 2002 à 22h17

Lorsqu'on demandait à Roland Topor ce qu'il haïssait le plus monde, il avait coutume de répondre: «Ce qui commence par la lettre P.» P. comme pogromes. A quoi le peintre Moïse Kisling pouvait ajouter cette injonction faite à son fils Jean: «N'oublie jamais que la Pologne est le pays le plus antisémite du monde!»

Ceux-là étaient les enfants de Juifs polonais, venus en France pour échapper aux persécutions et à la misère de leur pays natal. Ils avaient choisi la France «parce que c'était le pays de la Liberté et des Droits de l'homme».

Didier Epelbaum, journaliste reconnu et historien, a voulu élever un mémorial à ses ancêtres, à ses parents d'abord, en «bon titi des faubourgs», en «tityiddish», comme il l'écrit drôlement, «un peu confus par leur accent». Mais aussi pour ceux, tel Georges Perec qui se savait «différent, mais non pas différent des autres», mais d'abord des siens. Ou pour ceux qui n'ont pas souvenir du prénom d'un grand-père, du nom d'un village ancestral, loin en Pologne.

Il le fait aussi en hommage à tous ceux qui ont voulu reconstruire leurs vies ici, en changeant leurs horizons, leurs prénoms, mais en «saupoudrant de «yiddishkeit» («art d'être juif», selon la lumineuse traduction de l'écrivain Alex Derczansky) leurs enfants, qu'ils rêvaient en «mentschn», des hommes, des vrais, des «êtres humains, à part entière, respectés». Et parce qu'ils leur ont laissé «ces particules fugitives de souvenances, ces silences, les regards, les comportements face au danger, l'é