Comment vous êtes-vous intéressé aux «fondements géographiques» de ce que vous nommez «les nations du Prophète»?
Par mes travaux de géographie rurale dans la Turquie des années 50... C'est là que j'ai découvert le chameau de Bactriane! En effet, les Turcs sont arrivés en Iran et en Méditerranée avec leurs chameaux, animaux couverts d'une épaisse fourrure, qui peuvent survivre en hiver dans les montagnes de l'Asie centrale et, qui, par conséquent, représentent un instrument extraordinaire d'occupation des montagnes. Du coup, les nomades turcs ont parcouru les montagnes et détruit tous les villages sédentaires grecs ou arméniens sans aucune difficulté. En le métissant avec le dromadaire, ils ont pu créer des races hybrides qui leur ont permis de passer l'hiver dans les plaines basses et tièdes des bords de l'Egée et de la Méditerranée.
Mais ils ont rencontré un obstacle auquel leurs chameaux ne pouvaient pas être adaptés: les forêts littorales, basses, marécageuses et humides sur le versant anatolien de la mer Noire et le versant iranien de la mer Caspienne. Dans ces basses terres, les chameaux attrapent des parasites et meurent. Au sud, les chameaux des Turcs ne sont jamais descendus au coeur du désert arabo-syrien, se limitant à des pâturages d'hiver sur la lisière méridionale de l'Anatolie.
Ainsi le coeur du désert arabo-syrien est-il resté intégralement livré aux nomades arabes. Or, ceux-ci utilisaient le dromadaire; ce camélidé est un animal de basse terre qui s'adapte très