Comment le cinéma pourrait s'emparer de la représentation de la sexualité est devenu la mission, plus ou moins délibérée, de femmes cinéastes de plus en plus nombreuses. Emmanuelle Bercot, avec sa Puce d'une quarantaine de minutes, observe ce passage à la sexualité qui sert, ou devrait servir de frontière entre l'enfance et l'âge adulte, et le trouble afférent.
Sur la plage bretonne où elle trimballe ses premiers émois, Marion, 14 ans, a le choix entre un garçon de son âge et un homme. Comme elle est audacieuse, elle choisit le second. Le film dès lors enregistre avec beaucoup de délicatesse et autant de précision la rencontre de deux corps qui ne sont pas au même moment de la vie et, pour cette raison, s'attirent et se rejettent. Marion le veut, son dépucelage, mais son corps de petite fille résiste. En face, l'homme est fasciné par cette pureté qu'il imagine, qu'on peut trouver barbante, dont on ne peut nier qu'elle puisse aussi rendre fou.
Bercot assume sans encombre le fantasme «presque un père et sa fille», parce qu'elle a l'intuition, à laquelle son film rend grâce, qu'en toute relation amoureuse et sexuelle se nichent tous les tabous et tous les interdits, à divers degrés et des dosages. A ce prix est cette altérité qui fait circuler le désir, et qui n'est jamais sans danger. Bercot a une intelligence raffinée des gestes, auxquels elle se fie comme à un langage. Marion pense qu'il faut en passer par là, mais son corps ne peut savoir à l'avance les bénéfices qu'il en tir