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Libération
Interview

Un handicap dans la recherche de la vérité

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TzvetanTodorov : essayiste, la jugeant sélective, exprime son scepticisme.
publié le 13 avril 2002 à 23h01

La justice internationale a-t-elle un rôle à jouer, quand un Etat ne veut pas instruire les responsables présumés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, tel Slobodan Milosevic?

Avant d'être transféré à la Haye, Milosevic se trouvait dans une prison yougoslave pour être jugé par un tribunal de son pays. Ce procès-là aurait eu un bien moindre retentissement international, certes, mais il aurait pu exercer une action plus forte sur la société yougoslave elle-même. Le procès d'un ancien chef d'Etat, poursuivi pour sa politique, est forcément un procès politique; mais, au moins, s'il s'était déroulé sur place, il aurait pu contribuer à un objectif légitime: celui de faire prendre conscience à la société yougoslave de sa responsabilité dans les conflits de ces dernières années. Dans les conditions actuelles, son action en Yougoslavie sera ou bien de renforcer le sentiment de la population d'être la victime innocente d'un complot occidental, ou bien d'encourager une attitude de «réalisme» cynique: envoyons Milosevic se faire condamner ailleurs, pourvu que les dollars arrivent à la maison. Aux autres peuples et chefs d'Etat, ce procès enseigne qu'il vaut mieux ne pas s'opposer à plus fort que soi, une leçon qui ne brille pas par la nouveauté et pour laquelle on aurait pu se dispenser de convoquer la justice.

Parce que sélective, la justice internationale est imparfaite. Mais ce reproche ne vaut-il pas aussi pour les justices nationales? Pourtant, personne ne les remet en