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Libération
Interview

«Les Américains ne sont pas à l'aise avec le sujet»

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publié le 1er juin 2002 à 23h47

Educatrice et consultante, Deborah Roffman est spécialiste de la sexualité des enfants et adolescents à Baltimore (Maryland), auteur d'un livre référence (1).

Qu'est-ce qui rend si difficile de parler d'éducation sexuelle dans ce pays? La religion ?

Sans aucun doute. En Europe, votre politique est menée en fonction de recherches scientifiques. Si certaines approches marchent, on les applique. Ici, c'est un sujet très politique. On n'a toujours aucune preuve scientifique que «l'abstinence seulement» a des résultats, et pourtant ces programmes reçoivent de plus en plus d'argent...

Sur le fond, plus de 80 % des parents veulent que leurs enfants aient une éducation sexuelle complète. Mais les Américains ne sont pas à l'aise avec le sujet. Ils n'ont pratiquement aucune idée de ce qui est enseigné dans les écoles de leurs enfants, et font tout pour ne pas y penser. C'est un gros problème. La raison pour laquelle il y a une telle controverse, c'est l'offensive menée depuis les années 60 par la droite religieuse contre l'éducation sexuelle à l'école.

Ces gens sont aujourd'hui très actifs dans tout le pays. Un tiers des établissements américains enseignent «uniquement l'abstinence». Et si George Bush est réélu, je pense que ces programmes seront institutionnalisés dans l'ensemble du pays.

Pourquoi ce mouvement a-t-il pris ?

Jusqu'aux années 80, la droite religieuse ne voulait pas d'éducation sexuelle du tout. Avec l'arrivée du sida, elle a changé de stratégie : au lieu de rejeter toute édu