«J'ai des plumes (puisque certains me déplument). Je manque de nez et d'estomac. J'ai les Bourses vides. Je prétends avoir l'anus délicat. Qui suis-je ?» Un petit porteur. Les mésaventures boursières de Vivendi, Alcatel ou France Télécom semblent s'attaquer en priorité à une certaine catégorie de personnel capitaliste. Le petit actionnaire est mal coté, méprisé par les riches parce que petit, jalousé par les pauvres parce qu'actionnaire. On feint d'en avoir pitié mais on se moque de lui. On dirait que c'est lui qui a perdu le moins et qui se plaint le plus (il a joué une part énorme de sa fortune mais un pourcentage dérisoire des sommes en jeu). Il est comme quelqu'un qui, au casino, s'en prendrait au croupier en disant : «Pourquoi est-ce le 9 qui sort ? Pourquoi encore le 17 ? Pourquoi jamais le 5 ?» Il est mauvais joueur. On lui explique que la perte est la rançon de la spéculation mais il ne comprend pas parce qu'il n'a pas conscience d'avoir spéculé. Les spéculateurs, on nous a expliqué pendant des siècles que c'était des méchants qui attaquaient notre défunt franc, il ne s'y identifie nullement. Lui, il a juste investi. Il est un personnage moliéresque, Monsieur Jourdain de la Bourse, capitaliste gentilhomme qui fait de la spéculation sans le savoir, à l'insu de son plein gré. Il y a cru quand on lui a dit que l'argent travaille et voilà que l'argent s'est mis aux 35 heures, ou en grève, au chômage. Il ne bosse plus, le pognon. Le petit porteur joue dans les deux équipe
Le petit porteur se rebiffe
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par Mathieu Lindon
publié le 28 septembre 2002 à 1h10
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