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Libération
Critique

Au coeur de la tragédie

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publié le 2 novembre 2002 à 1h38

Saeb Erekat, le principal négociateur palestinien, laisse échapper ces quelques mots : «Nous sommes dans une tragédie grecque.» C'est presque la fin du film et c'est peut-être lui qui a raison. Le rêve d'Oslo vient de se briser. Neuf années d'efforts intenses ont été réduites à néant. Ariel Sharon va prochainement s'emparer du pouvoir. Le camp de la paix en Israël est exsangue. Les kamikazes islamistes vont bientôt se déchaîner. Les enfants palestiniens tombent déjà par dizaines sous les balles israéliennes. Et tous les acteurs sont coupables, même Bill Clinton pour son indéniable légèreté dans la préparation de Camp David.

Monstres. Les mythologies des deux camps ont donc été les plus fortes. Elles ont nourri les passions des hommes, les ont trompés, les ont fait mentir, ont engendré des monstres. Le seul héros qui a vraiment tenté de se dresser contre elles, Yitzhak Rabin, «l'homme qui voulait changer l'Histoire», a péri foudroyé sous le feu d'un jeune juif qui se croyait investi d'une mission divine. Et, comme dans la tragédie grecque, on voit les acteurs qui ploient sous le poids du destin, de la solitude. Ainsi, Shimon Pérès qui, succédant à Rabin, est confronté aux attentats, à la montée des adversaires de la paix, et avoue : «Je suis seul.» Le négociateur israélien Gilead Sher, après l'échec de Camp David, dira de Yasser Arafat qu'il n'était pas prêt «à affronter l'Histoire et les mythologies». Toujours la tragédie. Et c'est sans doute pourquoi le documentaire de Charl